La généralisation du télétravail induite par la crise sanitaire a bouleversé les pratiques professionnelles.
En septembre 2020, un tiers des salariés des entreprises du secteur privé travaillait à distance. Ces nouveaux dispositifs encouragés par le gouvernement ont donné aux employeurs des idées de contrôle pour s’assurer qu’éloignement ne soit pas synonyme de relâchement. Mais attention à ne pas franchir les limites…
La surveillance par l’employeur de l’activité des salariés en télétravail est-elle légale ?
En présentiel, rien n’empêche un employeur de surveiller l’activité de ses salariés. Le contrat de travail suppose en effet un contrôle régulier de la bonne exécution des prestations sans que le personnel ait à redire.
Le travail à distance étant une pratique équivalente au travail en présentiel, l’employeur disposerait du même pouvoir de contrôler que les tâches ont bien été réalisées.
Ce droit doit toutefois être justifié par la nature de la tâche à accomplir et rester justifié au vu de l’objectif recherché. En clair, certaines pratiques sont interdites.
Il s’agit notamment de la violation du secret des correspondances et d’une manière générale de la violation de l’intimité de la vie privée (informations nominatives, etc.)
Pour être légale, la surveillance doit être connue du salarié. Ce dernier doit avoir été informé du contrôle de ses activités qui peut porter sur :
- La surveillance via l’ordinateur (temps de connexion, durée de l’activité sur l’écran…)
- Le contrôle de l’heure de connexion et de déconnexion pour vérifier la durée du temps de travail journalière.
- La surveillance de l’espace de travail par webcam ou capture d’écran.
En France, le respect de la vie privée et des données personnelles des salariés est encadré par deux textes, à savoir le Code du travail qui garantit la protection des données personnelles dans le cadre du travail et le Règlement général sur la protection des données.
Des outils controversés, capables de contrôler à distance
Peut-on profiter du télétravail pour par exemple assainir sa maison en traitant les problèmes d’humidité ?
Si vivre dans un environnement sain reste primordial, privilégiez pour vos travaux personnels, des moments hors temps de travail. En effet, une kyrielle de logiciels a vu le jour pour informer les employeurs méfiants. Si bon nombre d’entre eux sont utilisés dans le monde, en France, leur mise en place reste toujours très encadrée.
Certains logiciels largement utilisés aux États-Unis sont en mesure de contrôler l’exécution des tâches, le temps passé pour les réaliser, l’heure de connexion et de déconnexion, les sites visités, la durée de visite sur Skype, le nombre de mails envoyés, la fréquence d’utilisation de Microsoft One Drive, etc…
D’autres, plus inquisiteurs, intègrent un keylogger. Ce périphérique enregistre électroniquement l’utilisation d’un ordinateur et surveille ainsi les frappes sur le clavier et les clics de souris.
Il peut aussi photographier le salarié via une webcam et enregistrer les conversations par le micro du PC. En France, la CNIL juge illicite l’usage de keylogger sauf en cas de circonstance exceptionnelle liée à un fort impératif de sécurité.
D’autres logiciels tout aussi décriés sont capables d’effectuer des captures d’écran du salarié à intervalles réguliers et rapprochés ou de traquer les données GPS afin de les transmettre sous forme de rapport au responsable hiérarchique.
L’obligation d’un maximum de transparence à l’égard des salariés
Tout système de contrôle des salariés dans une entreprise doit faire l’objet d’une consultation des représentants du personnel.
Les salariés doivent également être informés avant toute mise en place de tels dispositifs et renseignés sur leurs droits en matière de contrôle de leur activité (droits d’accès aux données collectées, de rectification, voire d’opposition à leur utilisation).
De même, dès lors que le système permet d’identifier un salarié, l’employeur est dans l’obligation de procéder à une déclaration préalable auprès de la CNIL de la mise en place d’un contrôle à distance.
Le défaut de déclaration jouera en faveur du salarié lors d’un recours aux prud’hommes.
Si une surveillance est prévue et connue, l’employeur doit prévoir des temps libres durant lesquels il ne sera pas autorisé à contrôler son personnel.
Pour plus de tranquillité, n’utilisez pas vos équipements personnels
D’une manière générale, il est fortement déconseillé aux personnes en travail à distance d’utiliser leur matériel personnel, notamment l’ordinateur en privilégiant l’usage d’équipements fournis et contrôlés par l’entreprise.
À défaut ils doivent protéger l’accès à leurs données personnelles. Cela commence par la sécurisation de la connexion Internet et la suppression du Wi-Fi invité.
Le recours à des logiciels “espions” est donc formellement interdit en France et les outils utilisés ne peuvent être installés à l’insu des salariés. Toute dérive peut donc faire l’objet d’un recours aux prud’hommes.
Le travail à distance nécessite d’être accompagné pour que cette nouvelle manière de travailler soit source de bien-être au travail.
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